L'actuelle crise du système éducatif a fini d'installer une grande inquiétude au sein de l'école sénégalaise. Au niveau de certaines écoles
visitées, les acteurs de l’éducation restent sceptiques par rapport à l’avenir de l’année
scolaire, perturbée par le bras de fer qui oppose l’Etat du Sénégal et le Grand
cadre du syndicat des enseignants. Toutefois, les potaches en classe d’examens
croient toujours à une solution définitive de cette crise pour pouvoir décrocher leurs sésames.
A l’école élémentaire de l’Unité
26 des Parcelles Assainies. En cette matinée de lundi, début de semaine, les cris
des élèves interpellant leur maître pour
aller au tableau, qui s’échappent des classes animent la cour de l’école. Au
milieu de celle-ci dort tranquillement le gardien, à quelques mètres du bureau
du directeur. «Ce qu’ils disent à la
population n’est pas toujours la réalité. Pour débloquer la situation, il faut
un dialogue sérieux avec les enseignants », dit cet enseignant, trouvé à quelques de la direction. Pour lui, la
source des problèmes c’est que l’Etat signe des accords sans les respecter. « L’année n’est pas perdue, il suffit
juste encore des efforts des deux parties pour aller vers un plan de rattrapage
afin de terminer les programmes et pouvoir faire les examens », ajoute
cet enseignant, qui dit être optimiste d’une issue heureuse. Toutefois, il a
une pensée aux jeunes écoliers. « Tôt
ou tard, il y aura un terrain d’entente. Mais les écoliers vont en pâtir avec
la pression à l’approche des examens et le surcharge de cours. Il y aura des
heures supplémentaires avec des cours les week-ends et les lundis et mercredi
qui vont nous permettre de combler le gap », explique-t-il, tout en
précisant qu’un accord signé doit être respecté. Par rapport à ce débat,
souligne le directeur de l’école de l’Unité 26 des Parcelles Assainies, Jacques
Diouf, les gens oublient souvent que c’est le droit des élèves d’aller à
l’école qui est bafoué. « L’Etat ne
respecte pas ce droit de l’enfant d’aller à l’école. Encore moins les
syndicalistes. Donc, avec ces grèves, il y a une réelle menace sur le droit de
l’enfant. Nous sommes à un niveau où les intérêts des deux parties ne se
soucient plus de ce droit de l’enfant. Or, celui-ci est au-dessus de tout intérêt »,
soutient M. Diouf.
Responsabilité
Selon lui, cette situation
s’explique par la démission et de l’absence de volonté des parents. Il dénonce
le mutisme de ces derniers qui ont un rôle à jouer dans cette crise. « Ils sont interpellés ! Les
parents ne jouent plus leur rôle. Il devrait y avoir une association de parents
d’élèves forte, voire une troisième force pour contrebalancer les intérêts des
uns et des autres. Celle-ci doit être une troisième force à la situation
actuelle, une interface entre le gouvernement et les syndicats d’enseignants.
Pourquoi pas même un mouvement syndical des parents d’élèves qui défendra ces
écoliers laissé à eux –mêmes ? », s’interroge Jacques Diouf. Dans
cette commune des Parcelles Assainies, cette école élémentaire, si l’on en
croit à M. Diouf, est l’une des celles qui cherchent une alternative à ces
grèves répétitives. Pour lui, il faut développer ce qu’il appelle les ‘’répétiteurs
communautaires’’. « C’est un engagement
citoyen qu’ont compris les jeunes. Ils ont adhéré à ce projet qui est une
contribution communautaire, qui vient en appoint à l’Etat. C’est ce qui nous
manque. Ce sont des jeunes du quartier avec un bon niveau qui viennent encadrer
les enfants les lundis, mercredi et les week-ends. Avec ce système, les enfants
font de bons résultats, en plus de se rattraper du temps perdu avec la grève», affirme-t-il.
« Je suis solidaire avec mes
élèves »
Au ‘’Cem 19’’, collège
d’enseignement moyen de la même commune, une bonne ambiance règne dans la cour
de l’école. Des fenêtres, on aperçoit des enseignants qui défilent au milieu
des élèves. Seuls quelques écoliers sont dans la cours dudit Cem. A quelques
mètres de la direction, le bruit de quelques élèves et un professeur de
Mathématique, qui discutent donnent vie à l’établissement. Même s’il reconnait
que le combat des enseignants est légitime, MS, un prof de Math dit être
solidaire avec ces élèves. Car, estime-t-il, les écoliers ne doivent pas être
sacrifiés. « L’Etat et les syndicats
doivent arrêter ce +jeu+’ dangereux. Ils trouveront des solutions tardives et
les élèves seront confrontés à des difficultés avec les pressions de rattrapage
pour finir le programme alors qu’ils devraient », prêche le professeur dans la cour du collège, un sac
et portable à la main. «Je suis solidaire
avec mes élèves en classes d’examen. Avec eux, je fais cours régulièrement. Je
l’ai clairement dit à mes camarades du syndicat. A cette période de l’année scolaire, la grève
n’a pas sa raison d’être. Il faut penser aux innocents écoliers »,
ajoute celui que les élèves appellent affectueusement ‘’Papa’’.
Dans ce collège d’enseignement
moyen, plus connu sous le nom de « Cem19 », les élèves sont aux préparatifs de leurs journées
culturelles. A quelques mètres de la direction de l’établissement, des élèves
de 3e comme Moustapha Ndiaye et ses camarades discutent de tout et
de rien. Ces jeunes sont inquiets de cette grève qui n’a pas encore dit son
dernier. « Nous allons vers des
examens mais nous ne sommes même pas à la moitié du programme. Ça va faire mal. L’Etat doit faire
des efforts, nous en souffrons. Nous sommes des jeunes, nous ne voulons
qu’étudier », argue Moustapha Ndiaye, candidat au Bfem. Pour Mamadou
Sadio Diallo, son camarade de classe, malgré ce bras de fer, une solution sera
trouvée. « La grève nous pénalise et
nous savons que les examens auront lieu. Seulement, nous en payerons les pots
cassés. On reviendra, on nous mettra de la pression. Les cours seront bâclés.
On ne peut pas terminer un programme en deux mois. Il faut avoir tous les
bagages qu’ils faut pour aller à l’assaut du Bfem », fait constater le
jeune Diallo. « A cette période, dit-il,
nous devrions réviser nos leçons. Or, nous ne faisons les cours que les lundis
et les samedis. Nous avons initié des travaux de groupes pour anticiper l’examen.
Mais j’avoue que ce n’est pas facile, parce que rien ne remplace l’explication
du professeur. On nous parle même d’un examen blanc début mai. Je ne sais pas
comment celui qui ne fait pas de cours peut faire un examen », se
demande-t-il. Diallo de préciser qu’ils en sont à trois leçons pour le cour des
Sciences de la vie et de la Terre(Svt) et six leçons en Histoire et géographie.
« C’est pénible pour nous. Nous n’avons
pas les moyens pour nous inscrire dans les écoles privées. Les deux parties ne
soucient pas de notre situation parce
que leurs enfants sont soit à l’étranger
soit dans les établissement privées », dit-il avec regret. Une
autre élève de la même école semble partager l’avis de ces jeunes. Pour Marème
Ndiaye en classe de 3e D, il urge de trouver des solutions. « Nous en avons besoin. Ils doivent penser
à nous. Ils ont entre leurs mains l’avenir des milliers d’écoliers. Il faut
nous éviter, dit-elle, de cette année blanche qui se profile». A quelques
mètres du Cem, sur la route menant vers le marché Dior, les parents d’élèves interpellés
sur la question disent être inquiets en tant parent d’élèves. « C’est un peu dur pour nous parents.
Non seulement, nous dépensons beaucoup pour nos enfants, mais c’est leur avenir
qui est en jeux. Les parties doivent arrondir les angles pour une issue
heureuse de la situation », a lancé une mère de famille sous
l’anonymat.
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