Elle est partie ma grand-mère, ma mère, bref un être qui m’est très cher. En rentrant sur Dakar, après la Tabaski, quatre jours passés à SEOUDJI, auprès de toi, je ne me doutais point que c’était la dernière fois que je posais le regard sur toi. Je t’avais donné la main gauche, tu fis de même. On s’était promis de nous revoir : « yène mbatté é niaamé », Nous étions nous dits.
C’était une tradition entre elle et moi. Pour ne pas dire un pacte par lequel Dieu nous assurait la santé, et la gloire de nous revoir. Certes, tu avais pris de l’âge, mais pour moi, il te restait quelques années encore. Oui, quelques années pour que tu puisses voir ta « coépouse », comme tu ne cessais de me le rappeler. « +Oumaram+ (Mon Oumar en Puular, elle me considéré comme son fils bien que je sois son petit-fils), qu’attends tu pour te marier ? A défaut de voir tes enfants, que je puisse au moins voir ma coépouse ».
Au village la majorité de mes amis, et petits frères avaient déjà pris épouses. Ce n’était pas le cas pour moi. Ayant quitté cette localité tout petit, je baignais dans un nouveau univers qui me faisait penser différemment. Je voyais les choses autrement. Aussi je n’étais pas prêt moralement pour me « pendre », comme on le dit. C’était une parenthèse, revenons à ma Grand-mère.
Le lundi 23 décembre, quand je débarquais dans la maison, une foule immense, installés ça et là, me montrait que la faucheuse était bien là. Elle t’a emporté « ma ». Quand je revenais à la maison, je me dirigeais directement dans ta chambre en lançant : « Soma !!».
Cette fois c’était différent « ma ». La maison était remplie d’inconnus. Les nattes et chaises installées ça et là, perturbaient ma présence. Je ne pouvais retenir mes larmes, car pour moi, tu étais toujours là. Mais, là, en voyant ces « inconnus », je me disais que ce n’étais pas fortuit. Pour me tromper moi-même, pour ne pas accepter ta disparition, je refusais d’aller dans ta chambre, où me dit-on, étaient installées les filles de ta sœurs «Athia». Pour ne pas voir ta chambre, située à droite de la maison, dans la «terrasse ». Je refusais de voir la vérité et d’accepter que tu es parti à jamais. Même, si pour moi, tu es là et tu resteras toujours là.
Hier, me dit-on, tu t’es réveillé tôt le matin pour prier. Ensuite, débarrasser la bouse de ta chèvre préférée, qui dormait dans la «terrasse », juste à côté de ta chambre. Ne te doutant point que c’est toi, qui allais bientôt partir « ma », tu demandais si «Diakariaou », « fils de ta sœur » qui étaient longtemps cloué au lit allait mieux. Ta petite fille, Assata, te rassurait que Oui il allait mieux.
Mais toi, tu devais partir quelques heures après. Le mardi quand je me suis réveillé je devais enfin accepter la réalité et entrer dans ta chambre (jadis, ma première destination), pour voir si tu étais encore là.
Désillusion ! La pièce, où je te trouvais chaque matin pour te dire bonjour était vide. J’entendais des voix sourdes, retentissant dans ta chambre. Elles me réconfortaient un peu, et je te revoyais toi, avec tes visiteurs matinaux, que tu appelais affectueusement « mathioubéma et des wayloubéma » !! Hélas ! Ce jour je n’y retrouverais que ces femmes voilées qui discutaient comme si de rien n’était. Je jetais le regard un peu partout pour te repérer, mais je ne te voyais point. Ainsi, je passais le bonjour d’une voix à peine audibles, mêlée aux larmes de tristesses. Je disparais pour réapparaitre à quelques mètres des toilettes. Devant l’endroit là où tu t’asseyais pour faire tes ablutions. Devant cet endroit où l’on discutait de tout et de rien. Là où tu me prodiguais de précieux conseils sur la vie, tu me rappelais mon rôle d’ainé de la famille que je me devais d’assumer avec brio, quel que soit les embûches qui parsemaient ma route. Là, les souvenirs ressurgissaient à flot. Et drainés comme des vagues sur un rivage, ils me disaient que tu étais là, en face de moi. Tes mots, ton rire, chaque bonjour matinal me manquent. Tu me demandais si j’avais pris mon petit déjeuner, si je veux du pain.
Je revenais ainsi à la réalité………. Tu es parti à jamais ! Mais sache que la mort n’arrête pas l’amour. Tu resteras dans mon cœur, dans mon esprit. Tu y demeureras de par tes conseils et les souvenirs que tu as sculpté en moi…
Je sais que tu reviendras Inch Allah ! Avec ton homonyme, la petite Soma Oumar Amadou Soma, comme tu aimerais qu’on l’appelle! Elle verra le jour, dans quelques années avec la princesse que je choisirai! Ça je te le promets « ma » ! Puisque je n’ai pas tenu ma promesse de te revoir, et te dire au revoir une dernière fois! Pour ton dernier voyage ! Paix à ton âme ! Car les témoignages sur tes bonnes qualités, ta sagesse, ta gentillesse et ta bonté étaient unanimes ! Rip Maamoyam bandam…Soma Amadou Modou Coumba !! Ton petit-fils